Un macaque, Un Selfie, Un Procès
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Les animaux ne sont pas les machines organiques qu’avait imaginées Descartes ; il est non moins vrai qu’ils ressentent la douleur, ont des émotions et que certains sont dotés de compétences cognitives que les hommes ont longtemps sous-estimées. Grâce à l’éthologie contemporaine, les frontières étanches que l’histoire des idées a construites entre les humains et le reste du monde animal sont devenues poreuses.
Cette conclusion a conduit récemment certaines associations à réclamer des droits pour les animaux que personne ne songeait à leur accorder hier encore. De ce point de vue, David Slater, photographe professionnel Britannique dont une des photos est mondialement connu viens d’atteindre un dénouement fascinant. L’un des macaques nègres (Macaca nigra), une espèce menacée d’extinction sur l’île indonésienne de Sulawesi, baptisé Naruto, lui subtilisa son appareil photo et prit quelques clichés. Lorsque David Slater récupéra son appareil, il eut la surprise de voir que certaines de ces photos étaient réussies.
Devenu un mème, un succès mondial, la question s’est posée de savoir si les droits d’auteur devaient revenir à l’homme ou au macaque. Peta, une association américaine de défense des animaux, a engagé des actions en justice et a fini par conclure un accord à l’amiable avec le photographe : 25 % des droits générés par l’image seront versés à des œuvres destinées à protéger les milieux de vie de ce singe et d’autres macaques indonésiens.
Faudrait-il par exemple octroyer aux animaux des droits d’auteur ? Pour des documentaires animaliers, des vidéos de stock, toutes photos ? Ce néoanimisme qui conduit à le remplir de nouveau est donc surprenant, d’autant que ceux qui sont à la manœuvre ici et réclament des droits pour les animaux, pour les plantes (et peut-être bientôt pour les minéraux) revendiquent souvent, parallèlement, un retrait global de l’homme.